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Jae-Kyoo CHONG// Lumière Portée


Exposition in situ de Jae Kyoo CHONG //Photographies Plastiques

Du 31 mai au 21 juillet 2019

Vendredis, samedis, dimanches et jours fériés de 14h à 19h

Invité le Groupe Novembre

Commissariat Virginie Prokopowicz Critique d'art: Jean-Louis Poitevin, membre AICA

Vernissage le samedi 1 er juin à 18h//prieuré de Pont-loup

Jae-Kyoo Chong est un artiste coréen qui vit en France aujourd’hui depuis quarante années. Cela fait plus de la moitié de sa vie qu’il a quitté le pays natal, jamais oublié cependant, et qu’il a inscrit son œuvre dans une méditation profonde sur la grande tradition de l’histoire de l’art occidental non sans oublier les lieux de sa vie quotidienne présente et passée. C’est pourquoi chacune de ses œuvres peut être comprise comme une sorte d’hommage à l’un ou l’autre de ces deux pays et à leur culture millénaire. C’est en balançant d’un bord l’autre tel un navire serein qu’il tisse son œuvre, à même la peau de l’image, à même le spectre des images, à même la trame d’absence qui ne cesse de surgir ineffaçable stigmate, dans les reflets du visible sur l’œil qui ne parvient pas à oublier. Schizophrène culturel, Jae-Kyoo Chong en sait plus que beaucoup d’autres sur les distinctions qu’il importe de faire entre ici et ailleurs, entre là et là-bas, entre lointain et proche. Et c’est à cette tâche spécifique qu’il consacre cette exposition : mener une réflexion d’ampleur sur ce qu’il en est du site, du lieu, de l’espace et du signe comme médium médiumnique faisant des allées et venues incessantes entre les pâleurs de l’âme et les rugosités de la terre. L’art n’a pas une histoire, l’art est histoire parce qu’il raconte même quand il prétend le contraire, puisqu’il ne cesse de revenir sur lui-même boucle aimantée, creusant, semant, faisant croître et fauchant pour mieux pouvoir recommencer. L’art est cette pratique incessante qui va de la terre à son éveil comme forme hantée par les forces qui sans cesse la font naître. C’est pourquoi le site est au cœur de toute méditation picturale comme photographique. Les images de Jae-Kyoo sont des images découpées en lamelles et recomposées par entrecroisements et tissage. quel que soit le mode singulier choisi, le mélange, le décalage de positionnement, l’entrelacs de strates, le site toujours est là qui intervient à même l’image. Le site est ce qui a sauté du dehors dans l’image et qui à revers, saute de l’image vers nous qui nous tenons au dehors. C’est dans ce va-et-vient que se fabrique toute œuvre d’art. Le sachant, Jae-Kyoo Chong fait porter aujourd’hui sa méditation sur le site même en utilisant des œuvres « originaires » du Land Art comme de son anticipation impressionniste. Il les traite à sa manière au moyen d’une interprétation plasticienne. L’image, alors, quelle qu’elle soit, s’impose comme l’inévitable manière qu’a inventé l’homme de se saisir du lointain et du dehors à jamais insaisissable pour le mettre à la fois à portée d’œil et de main et surtout de cœur. Pour cette exposition intitulée Lumière portée, il part des traitements que la photo plasticienne peut faire subir à des images du Land Art et il prolonge sa réflexion en l’appliquant au site de Moret-surLoing, à son église, son canal, ses arbres. Il revisite des images déjà existantes comme celles que Sisley y a peintes, lui qui s’installa ici. Cet endroit magique sous le pinceau de Sisley devient un havre de paix où il semble à la fois que tout coule, tout glisse, tout; sauf le temps qui, lui, semble s’être épris de ce site. L’art alors, on le voit consiste à revisiter ce lieu immobile et à le mettre à nouveau en mouvement afin qu’il vienne, enfin, se jucher à hauteur d’œil jusque à toucher le cœur. C’est que pour Jae-Kyoo Chong tout a la densité de la terre, c’est-à-dire du rêve qui enveloppe toute notre vie, du rêve qu’est notre présence au monde, du rêve qu’est le souvenir d’avoir été avant même que d’avoir commencé à être. C’est cette coïncidence entre l’image et une image qu’il traque. Et lui, il le fait en découpant et tissant sans fin, tel un magicien obsessionnel cherchant la quadrature du cercle, des lignes droites à partir de la courbure mentale que le soleil dépose au fond de nos mémoires. L’art est cette ambiguïté vécue et ce savoir intime porté par une incertitude absolue que la réalité de toute chose, lorsque s’affirme la sensation profonde de l’existence, est une bénédiction. Site et lieu se retrouvent dans l’image mais pas comme image. Il y surgissent comme puissance de transformation de l’image en un observatoire tactile et visuel des sensations variables mais intenses qui nous habitent lorsque nous ouvrons les yeux au monde. Jae-Kyoo Chong est de ceux-là qui pratiquent l’art comme un viatique. Avec cette exposition Lumière portée, il s’avance vers son but qui n’est autre que le voyage même. C’est pourquoi grâce à son attention pour les chiffres, les dates et les commémorations, pour fêter des décennies d’amitié et de travail commun, et se souvenir de la remarquable exposition qui eut lieu en 2009 à Séoul, il a aussi invité ses amis du Groupe novembre. Chacun d’entre eux, Martial Verdier, Olivier Perrot, Xavier Lucchesi, Monique Cabasso, viendra habiter le site de l’église avec une installation. Ainsi cha cun prolongera la méditation de Jae-Kyoo Chong et rendra un hommage à la pratique plasticienne de l’image photographique. Cela signifie pour eux que l’image est tout sauf une représentation, car c’est la présentation, en toute conscience, à travers des éléments visuels, de ce que le visible ne se réduit pas à ce que l’œil perçoit, mais n’existe que s’il est porté et embrassé par une vision comme Image portée. Et une vision, elle, n’est pas seulement un fait qui a trait au visible. C’est un ensemble de gestes qui font et défont l’image, l’emportant avant même qu’elle ne naisse au-delà de la simple représentation, comme si elle était moins un double de ce qui est que le tapis volant permettant d’atteindre enfin, la hauteur du rêve. Jean-Louis Poitevin. écrivain, critique d’art, rédacteur en chef de tK-21 Larevue, membre de l’AICA

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